L’aquataxe sera-t-elle un nouveau moyen de lutte contre les inondations?

L’aquataxe sera-t-elle un nouveau moyen de lutte contre les inondations?

Source : La Voix du Nord www.lavoixdunord.fr publié le 23/01/2014 par AMANDINE FARAUD


Du bassin de la Liane à la vallée de la Slack, de nombreuses communes du Boulonnais ont besoin de travaux de lutte contre les inondations. Une nouvelle loi permettra à partir de 2016 aux mairies de lever une taxe pour leur financement. Sera-t-elle utilisée et permettra-t-elle de réelles avancées ? Pour le moment, les acteurs concernés... doivent y réfléchir.




Elle est née en décembre dernier, mais ne sera applicable qu’en janvier 2016. L’« aquataxe» ou taxe inondations* pourra être utilisée par les communes ou intercommunalités ayant des projets de travaux d’entretien. Levée avec la taxe d’habitation auprès des particuliers et des entreprises, elle ne pourra excéder 40 € par habitant. Alors, une nouvelle taxe sur la tête des contribuables ? Pas sûr. Si les financements sont de plus en plus difficiles à trouver pour la lutte contre les inondations -comme dans beaucoup de domaines-, les maires du Boulonnais n’ont pas l’air prêts à augmenter les impôts pour autant. Du moins pas pour le moment.

L’eau ne connaît pas de frontières
Christèle Alexandre, directrice du SYMSAGEB**, souligne qu’ « on ne gère pas les inondations avec des renforcements de berge là où l’eau déborde. Il faut aussi travailler en amont. Un exemple : si on veut protéger Hesdigneul, il faut faire un ouvrage sur Nesles. Alors, comment on applique la taxe ? À Nesles ou à Hesdigneul? C’est très compliqué ». Pourtant, « on avait alerté les députés avant la discussion de la loi sur la problématique des bassins versants, dont le périmètre est différent de celui des communes ou même des communautés de communes ».

Actuellement, selon l’ampleur et le coût des travaux, les communes les financent sur leurs propres deniers ou font appel au SYMSAGEB. Entre 2007 et 2009, il a réalisé de gros ouvrages de stockage (215 000 m3 au total) sur Baincthun, Echinghen et Condette. Depuis sa création, il y a une dizaine d’années, il a aussi mené un recalibrage sur la Liane (un changement de lit), sur le Wimereux (à Conteville), et a posé des clapets anti-retour sur plusieurs communes, comme Saint-Léonard, Hesdin-L’Abbé ou Hesdigneul-les-Boulogne.

De moins en moins de subventions
Financé par l’Agence de l’eau, la région, le département, l’État, l’Europe (via le FEDER), ainsi que par les intercommunalités concernées (communauté de communes de Desvres-Samer, CAB, Terre des 2 Caps, Mer et Terre d’Opale, Trois pays, Sud Calaisis), le SYMSAGEB est pour le moment le levier privilégié par les mairies pour appuyer et mener leurs projets. Mais cette nouvelle taxe pourrait tout de même être utile :

« Elle permettrait peut-être de réaliser de petits projets pour lesquels on trouve de moins en moins de financements, fait remarquer Christèle Alexandre. De petits projets ponctuels, pas forcément très onéreux, et qui solutionnent un problème circonscrit. Aujourd’hui, il faut un nombre d’enjeux tels pour prétendre à un financement, qu’il n’y en a plus pour ces projets-là. »

Au pied de l’échéance des élections municipales de 2014, cette taxe applicable en 2016 paraît encore lointaine... Elle pourrait pourtant être utile si les subventions venaient à manquer.

*adoptée par les députés dans le cadre de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et affirmation des métropoles.

**est dédié à la lutte contre les inondations, notamment en ce qui concerne les bassins de la Liane, du Wimereux et de la Slack. Il est mandaté par les communautés de communes concernées.

Condette: «L’important, c’est de faire de multiples petits travaux»
Bien qu’il pense que c’est un problème majeur, et qu’« il y aura de plus en plus d’eau », le maire de Condette, Kaddour-Jean Derrar, ne pense pas utiliser la taxe inondations, « sauf si on est dans l’obligation de le faire ». Pour lui, « l’important, c’est de faire de multiples petits travaux ». Plusieurs points sont concernés, notamment aux abords du cimetière, dans la rue John Withley, où de nouveaux aménagements vont être faits.

Quant aux moyens employés : « la première arme, c’est de ne pas construire n’importe où n’importe quand. Ensuite, c’est de faire des travaux ». Plusieurs projets sont en cours : l’expropriation des Bas-Champs, devant la mairie, pour en faire des marais et y installer des maraîchers ; une procédure d’intérêt général est lancée pour faire des diguettes sur une propriété privée en amont du cimetière, « ce qui éviterait les inondations dans la rue Whitley » ; ou encore la rétrocession de cette rue par le Département, qui permettrait un buzage plus important pour un meilleur écoulement de l’eau. Et si les subventions venaient à manquer ? « Les gens sont déjà étranglés, c’est difficile d’augmenter les impôts », même s’il rappelle que « la part communale n’a pas changé depuis près de 20 ans». Il préfère compter sur le SYMSAGEB, avec qui « ça marche très bien ».

Samer : «Cette taxe ne nous intéresse pas»

Claude Bailly, le maire de Samer, ne voit pas l’intérêt d’appliquer cette taxe : « Nous ne sommes pas tellement concernés par une taxe inondations. Des travaux sont en cours d’étude, il faudra faire un bassin de rétention. Mais on va déjà devoir traiter la turbidité de l’eau, qui est distribuée à tout le Boulonnais, via les stations du Molinet, de Tingry et Carly. »
Et si de nouveaux travaux sont bien prévus, ils sont déjà financés, notamment par la Communauté d’agglomération du Boulonnais.
Le maire ne souhaite pas non plus faire monter la fiscalité : « On peut difficilement augmenter le prix de l’eau. »

Les projets du SYMSAGEB pour 2014
Au Symsageb, la priorité sera donnée cette année à une étude hydraulique de la Slack, pour mieux comprendre son fonctionnement et effectuer ensuite les travaux nécessaires, comme la vidange des marais et de l’estuaire de la Slack pour une exploitation agricole par exemple.
Des travaux de restauration des berges et d’entretien doivent démarrer prochainement sur la Liane et la Slack. D’autres devraient suivre sur le Wimereux au cours du premier semestre.
Par ailleurs, des demandes de subventions seront déposées pour un plan d’action de prévention des risques d’inondation (PAPI), afin d’établir des études hydrauliques sur le Wimereux et la Liane.